Carole

Secrets de femmes

MAÎTRE CAROLE

Étoile d'or de la voyance en 2018, c'est désormais une personne en phase avec ses prédispositions et convictions. Ce qui n'a pas toujours été le cas. Loin de là. « J'aurais bien aimé devenir comédienne ou faire de grandes études. Ça n'a pas été possible. Avant de se poser en atout majeur, mon don pour la voyance m'a marginalisée, au sein du milieu scolaire notamment ».

Si Maître Carole relate aujourd'hui cette expérience de façon apaisée, son atypisme fut durant les premières années de son existence plus encombrant que facilitateur. En particulier dans une société formatée où la différence est plus souvent source d'exclusion que d'attirance. « Je suis une métisse née de l'union d'un père européen et d'une mère africaine. Mes grands-parents paternels nous ont toujours renié ma mère et moi. Notre couleur de peau ne leur convenait pas ».

Autre fait hautement marginalisant pour Carole, ses prédispositions à édicter des vérités à venir. Dès le collège, sa franchise la pousse à annoncer à ses amies des prédictions difficiles à entendre. « Je me rappelle avoir prévenue une amie que ses parents allaient divorcer. Ce qui s'est produit neuf mois plus tard. Sur le coup, elle est partie en pleurs. Le directeur m'a convoqué pour me sermonner. Je ne comprenais pas pourquoi on me réprimandait. Je ne voulais de mal à personne. Je me sentais toute bizarre ».

Des anecdotes de ce genre, Carole pourra en raconter de multiples. Elle n'en est qu'aux prémices d'un long parcours jonché d'incompréhensions. Jusqu'au jour où le pire surgit. Elle répand dans la cour du lycée une nouvelle selon laquelle la mère de son professeur d'anglais allait prochainement décéder dans un accident de la route. Furieux d'entendre colporter ce qu'il pense être le fruit de l'imagination morbide d'une adolescente perverse, le proviseur décide de l'exclure. Ce qui n'empêchera pas la personne en question de trouver la mort au volant de sa voiture cinq semaines plus tard. « Un an après le drame, le prof d'anglais est venu me voir à la maison. Il voulait tenter de comprendre pourquoi j'avais prédit cela. J'avais en face de moi un homme terrifié. Je n'avais rien de logique ou de sensé à lui répondre ».

Petit à petit, l'entourage de Carole devine sans la comprendre qu'elle visualise des événements à venir. Plutôt que de l'encourager dans le développement de son don, sa famille et ses amis prennent leurs distances. La jolie métisse est considérée comme une bête curieuse à éviter autant que possible. « En fait, ce n'était pas le problème. J'avais davantage peur de ce que je voyais pour les autres que de ce que les gens pensaient de moi. J'ai par exemple détesté découvrir que mon père allait tromper ma mère ».

« Exploiter ce don encore insaisissable »

Les rapports de Carole et son géniteur atteignent des sommets d'ambiguïté. Ce dernier, oscillant entre effroi et curiosité, n'hésite pas à la tester. « Un jour, mine de rien, il me demande de quoi sera fait son avenir professionnel. Alors qu'il n'est qu'un modeste plombier, je lui annonce qu'il va devenir architecte d'intérieur et gagnera très bien sa vie. Ce qui se vérifiera dix ans plus tard ».

Lorsqu'elle atteint sa majorité, Carole n'est pas en paix. Que faire ? Tenter de se former à un métier conventionnel où elle risque de se heurter à d'inévitables incompréhensions de la part de son entourage ? Ou, au contraire, exploiter ce don encore insaisissable dont elle ne connaît ni l'origine, ni les limites ? « Je ne voulais plus envisager la voyance avec les gens que j'aimais. C'était trop déstabilisateur. Pour eux comme pour moi. En revanche, en m'adressant à des personnes que ne je connaissais pas, je me suis dit que ce serait un bon moyen de les aider ».

Après avoir fait ses classes avec succès dans sa ville d'origine, Carole finit par rejoindre le cabinet Astropédia. Très sensibilisée à la cause des femmes dont elle intègre les problématiques avec une aisance énergique, son don naturel pour la voyance lui permet d'entretenir avec ses consultants des rapports professionnels et de confiance. « Je suis très attachée aux gens. Voir et prédire, c'est une chose. Aider et guider en est une autre. Aucun destin n'est gravé dans le marbre ».

Lorsqu'elle rentre chez elle le soir après une journée de consultations, Maître Céleste est heureuse. Heureuse d'être comprise, enfin. Heureuse d'apporter sa petite pierre au grand édifice du bien-être de l'humanité.